Sur les étals des marchés, la saison du salsifi bat son plein entre décembre et mars. Dépêchez-vous ! La Belgique et les Pays-Bas sont les deux principaux pays producteurs et cette racine pousse chez nous sur les sols sableux de Picardie et du Loiret. Sa valeur calorifique est faible, mais sa valeur nutritionnelle se révèle intéressante. Le salsifi est riche en potassium et en calcium, il affiche un bon taux de manganèse et possède un pouvoir anti-oxydant. Enfin, ce légume fibreux est bon pour les intestins.

Le salsifi version confit

En cuisine il est souvent cantonné à un rôle de garniture, soit seul, soit mélangé à d’autres légumes. J’ai eu récemment l’occasion d’en déguster une version confite proposée par le chef Vivien Durand lors d’un dîner au restaurant étoilé le Prince Noir, à Lormont, près de Bordeaux. Cette préparation adoucit la perception du salsifi tout en gardant le côté racinaire. Les brisures de truffes noires accompagnées d’une réduction de Porto qui l’agrémentent apportent beaucoup de saveurs. L’association sur un vin rouge est ici possible.

Lors de cette même soirée, le mariage s’est ainsi effectué avec un superbe vin croate millésimé 2009 signé Léo Gracin. Ce vin issu des terrasses rocailleuses du Primosten, en Dalmatie centrale, livre une belle définition du cépage dingac. Les fruits noirs, les épices, la touche d’humus apportée par son évolution positive lui communiquent une formidable complexité. Le relief tannique s’annihile sur le côté confit du salsifi.

Si je devais servir un vin français, je partirais aussi du côté de la Méditerranée. Avec, par exemple, Le Grand Rouge 1991, une belle expression provençale signée Peter Fischer, au château Revelette. Composée de syrah et cabernet-sauvignon, cette cuvée oscille entre les arômes de garrigue, humus et sous-bois. Sa bouche est fine et sapide, l’ensemble se montre élégant.

Le salsifi version glacé

Au piano de Frenchie, rue du Nil à Paris, le chef Grégory Marchand travaille les salsifis glacés au miel avec un crumble de panais et kumquat. Un ensemble suave, auquel saveurs d’agrumes et l’amertume du kumquat apportent du peps. L’option d’un vin blanc demi-sec ou d’un moelleux pas trop riche doté d’une belle acidité est ici possible. Mon choix se porte sur un vin de macération, plus précisément un vin orange du Roussillon.

Au domaine Le Soula, Wendy Paillé nous gratifie d’une jolie cuvée, La Macération du Soula n°16, composée comme une solera de différents millésimes : 2009, 2013, 2014, 2015 et 2016. Assemblage d’une majorité de vermentino avec du macabeu, du sauvignon blanc et du tourbat (ou Malvoisie du Roussillon), ce vin subit une macération de quinze jours qui lui donne cette fine présence tannique fidèle à ce type de vin. Une amertume tannique qui se joue parfaitement du côté racinaire du salsifi. Les arômes et les saveurs sur l’Orange confite et le quinquina se marient à merveille avec le kumquat. Bonne découverte !

La Revue du Vin de France, avril 2019