Contrairement aux idées reçues, l’association vin rouge et homard est possible. Elle dépend du type de cuisson, de la sauce et de la garniture. Les vins les plus adaptés sont les rouges jeunes au fruité primaire, pas trop marqués par le bois ou l’élevage. Il faut privilégier les vins juteux, peu extraits et sapides. La fraîcheur de fruit et la trame infusée sont deux choses les plus importantes dans le choix du vin afin de ne pas dominer la chair du homard. De grands chefs français préparent le homard avec des ingrédients qui permettent d’aller plus facilement vers un vin rouge que vers un blanc.
Le homard selon Pascal Barbot
Pascal Barbot, chef de l’Astrance à Paris cuisine le homard à la fraise et aux oignons nouveaux. La fraise fait un excellant liant avec le vin rouge et la chair iodée du homard accepte bien un vin appétant, sans excès d’alcool, regorgeant de fruit. Je pense au joli Regnié 2014 du Domaine Julien Sunier à Avenas, un beau gamay scintillant au fruit pulpeux, à la bouche veloutée, sur la parcelle En Oeillat, à la limite de Morgon. La belle acidité des 2014 en Beaujolais sied bien au côté iodé du crustacé. Il en est ainsi du Beaujolais-Villages Les Vignes de Jeannot 2014 de Nicolas Chemarin, une cuvée vieilles vignes au fruit avenant tirant sur le côté bourguignon, griotte, pivoine. Sa texture de bouche agréable et sapide donne une association tout en délicatesse.
Le homard selon Jean-François Piège
Jean-François Piège, Le Grand Restaurant à Paris, concocte quant à lui un homard au cassis et au poivre de Pondichéry. Ici un vin bourguignon se révèle une excellente option. Il faut privilégier un vin jeune au fruit exacerbé, où le pinot noir oscille entre le cassis et la griotte. J’opte pour un simple bourgogne rouge : la Cuvée Noble Souche de Denis Mortet. Issue de pinot noir planté à 400 mètres, elle conserve un fruit bien frais et une mâche désaltérante. Sur cette préparation, vous pouvez aussi choisir un coteau-champenois rouge. A Courmas, près d’Ecueil, Yann Alexandre produit de délicieux Terre de Clos 2014, un pinot noir très gourmand, à l’élevage fondu et subtil, à la trame souple et harmonieuse, qui séduit par sa fraîcheur. Servez ces deux vins à 15-16 degrés afin de faire jaillir le fruit.
Le homard selon Frédéric Anton
Au Pré Catelan, à Paris, Frédéric Anton réalise un grand classique : le homard à l’américaine. Cette sauce relevée par le piment de Cayenne et l’estragon est gouteuse, sans excès d’épices. Pour l’accompagner, essayez le délicieux bourgogne rouge 2013 du Domaine Robert Groffier. Une aussi jolie matière dans une appellation générique fait plaisir ! Vous pouvez aussi partir sur le Saumur Champigny Clos de la Bienboire 2015 du Château de Villeneuve. Issu d’un clos de 1,5 hectare, c’est un vin bien mûr, où le côté graphique du Cabernet franc amène de la fraîcheur sur la maturité de la vendange. Fruité et digeste, il est parfait pour ce plat. Passons à table !
La Revue du vin de France, sept 2016